Retrouvé dans le monde entier, le puceron Melanaphis sacchari s’attaque préférentiellement aux plantes de la famille des Poaceae. Bien que sa présence aux Etats-Unis ait été rapportée dès 1922, il ne cause des dommages importants sur le sorgho que depuis 2013, ce qui a suggéré l’hypothèse que ces attaques plus intenses soient le fait d’un nouveau variant qui posséderait une affinité particulière pour le sorgho, ou encore d’une nouvelle espèce, Melanaphis sorghi. Ce puceron peut aussi coloniser diverses espèces végétales sauvages, dont Pennisetum sp. et Sorghum halepense, ainsi que le riz et le maïs.

M. sacchari est apparu en Haïti en 2015 et depuis il a proliféré dans toutes les zones du pays, les variétés locales de sorgho se montrant très sensibles à son attaque. En réaction à cette situation et devant l’ampleur des dommages que ce ravageur cause aux récoltes, les Affaires Mondiales Canada et le gouvernement haïtien ont appuyé le projet AKOSAA de l’Université Laval et son partenaire haïtien, le Chibas (associé à l’Université Quisqueya), pour l’évaluation, la multiplication et la diffusion à grande échelle de lignées de sorgho tolérantes à M. sacchari.

Cultivé par 32% des producteurs haïtiens, le sorgho est la troisième culture en termes de surface emblavée. Avant l’arrivée de M. sacchari, Haïti produisait environ 100 000 tonnes métriques de sorgho par an, ce qui représentait un peu plus de 20% de la production nationale de céréales. Le sorgho est surtout cultivé en zone de montagne, là où l’irrigation est moins disponible et où les ménages sont le plus vulnérables. Elle est dite une « céréale de soudure », c’est-à-dire qu’elle demeure le seul aliment disponible lorsque le maïs et les autres grains ont été consommés et que les familles attendent les prochaines récoltes.

Appuyé conjointement par les Affaires Mondiales Canada et le Ministère de l'agriculture, des ressources naturelles et du développement rural (MARNDR), le projet AKOSAA et son partenaire le Chibas ont entrepris de produire plus de 500 tonnes de sorgho «pitimi papèpichon», tolérant au puceron jaune. Les semences ensachées et traitées sont ensuite distribuées aux 300 000 producteurs et productrices de sorgho du pays, contribuant ainsi à sauver cette filière agricole cruciale pour la sécurité alimentaire et d'une valeur annuelle de 20 millions de dollars.